Tout le camp sommeille
Le général veille,
L'aurore vermeille,
Ne luit pas encor;
Sur l'enceinte immense,
Dans l'ombre s'élance,
Et plane en silence
L'oiseau de la mort.
L'âme tranquille,
Le chef habile,
De son asile
Sort dès le matin.
Son oeil embrasse
Le vaste espace
Et sa main trace
L'arrêt du destin.
2. Notre artillerie
Est en batterie
Notre infanterie
Manoeuvre et s'étend.
Phalanges plus belles,
Nos lanciers fidèles
Dirigent leurs ailes
Où Mars les attend.
Les dragons passent,
Les flots s'amassent,
Nos hussards lassent
Leurs fougueux coursiers;
Troupe éclatante,
Masse imposante,
A l'oeil présente
Nos fiers cuirassiers.
3. Les trompettes sonnent,
Les clairons résonnent,
Les coursiers frissonnent,
Prêts à s'échapper,
L'ennemi agite
De ses corps d'élite
Veut couvrir la fuite
La mort va frapper.
La charge sonne,
Le bronze tonne,
Le feu sillonne,
Moissonne les rangs;
Et la fumée
Dans l'air semée,
Couvre l'armée,
De ses noirs torrents.
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4. La garde s'engage,
S'ouvrant un passage
Au sein d'un nuage
D'épaisses vapeurs.
Ses vieilles moustaches
Montrent leurs panaches,
Flottant sur les haches
De nos vieux sapeurs.
Destin étrange!
Soudain tout change:
Le crime arrange
Un succès vendu.
Nos rangs se brisent,
Nos feux s'épuisent,
Des traîtres disent
Que tout est perdu!
5. Belliqueuse garde,
L'Anglais te regarde,
T'admire et retarde
Les feux et ton sort.
Ses lignes s'entrouvrent
Et vers toi découvrent
Cent bouches qui s'ouvrent
Pour vômir la mort.
Troupe immortelle
Sa voix t'appelle:
Français, dit-elle,
Chargés de lauriers,
Tout nous seconde;
La foudre gronde,
Sauvez le monde
Les premiers guerriers.
6. Fortune, tu braves
Vainement nos braves;
Des Français esclaves!
Desseins superflus.
Tu peux les entendre:
Nous savons attendre
La mort sans nous rendre.
Ils n'existent plus.
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